Il y a deux semaines, j’ai connu une sortie pour le moins… pénible. Laissez- moi vous la raconter.
J’avais prévu un 200 avec deux amis de mon club. Une boucle depuis le Val-de-Marne, en montant vers le nord jusqu’à la Ferté-Milon et retour.
Je me suis levé en forme, mais avec un mauvais pressentiment.
J’avais pris la précaution de regarder le profil du parcours, qui était loin d’une étape alpine… Mais je voyais bien que les bosses allaient s’enchainer. À l’aller comme au retour.
J’en comptais une vingtaine au total.
Jamais de quoi peiner durant des heures, certes. Des élévations de 50 à 150 mètres tout au plus. Mais qu’il faudrait avaler l’une après l’autre.
Je n’ai pas vu passer les trois premières heures. Encore quelques tours de pédales et nous rentrions dans les Hauts de France. Je ne savais pas que je venais de manger mon pain blanc.
Les bosses réalisaient à merveille leur travail de sape. Les cuisses s’engourdissaient peu à peu. J’essayais de regrouper mon énergie, mais elle me filait entre les doigts.
Le dernier quart du parcours fut un vrai calvaire.
J’ai vu s’égrener sur mon compteur chacun des 20 derniers kilomètres. On se motive comme on peut. L’arrivée à la maison sonna comme une délivrance.
Heureusement, mes premières sorties en montagne sont encore loin pour cette saison.
Je me suis replongé dans les entrainements et astuces de toutes sortes qui m’avaient permis de progresser dans les pentes les saisons précédentes.
J’ai rassemblé les conseils de mon coach et de mes mentors. Tout ce qui m’a permis, il y a quelques années de terminer ma première Étape du Tour 8 mois après avoir commencé le vélo.
Et avec mes 90kg sur la balance, croyez-moi ce n’était pas gagné.
Je vais vous faire partager ces points.
Une simple liste, rapide, efficace.
15 techniques que j’ai pu tester et qui vous aussi peuvent vous aider.
On y va.
1/ S’alléger
Sur le plat, à vitesse constante, votre poids ne vient pas contrarier vos efforts. Il ne freine pas votre déplacement. Il vous faut lutter contre lui lors des phases d’accélérations, mais ce n’est pas notre sujet aujourd’hui.
Lorsque les pentes se présentent, les choses se compliquent. Le poids devient alors la principale force de résistance.
Il vous tire vers le bas.
Sur un col de 12 km à 8%, un cycliste de 75kg normalement entrainé qui perdrait 4 kg gagnerait 1min 20 secondes. De quoi creuser un écart de plus de 400 mètres.
Avec un poids de 90kg, un gain de 4kg serait synonyme de 2min 30 de moins.
Motivant, non ?
Celui qui ne maitrise pas son poids va trainer un boulet.
C’est la raison pour laquelle les constructeurs nous vendent si cher des composants plus légers. Si vous avez lu mon guide ‘Comment choisir votre prochain vélo route’, souvenez-vous : de l’ordre de 1200 euros pour gagner 1 petit kg.
Ne vaut-il pas mieux s’attaquer à son propre poids plutôt qu’à celui du matériel ? Je vous laisse juge…
2/ Gravir des pentes
Oui cela sonne comme une évidence.
Pour apprendre à nager, vous avez plongé dans la piscine.
Pour progresser dans les côtes, il va falloir en avaler un peu. Des cols ou des enchainements de bosses ? Les deux.
Le premier demande une gestion de l’effort dans la durée.
Le second apprend à absorber une succession d’efforts de courtes intensités.
3/ Le coup de pédale de la montagne
En raison de la pente, l’angle entre le buste et le fémur n’est plus le même que sur le plat.
Les premières fois, le néophyte est un peu dérouté.
Ce sont de nouvelles sensations à apprivoiser. C’est un nouveau coup de pédale à trouver.
Rien d’insurmontable.
Mais à propos de pédalage, il y a mieux. Beaucoup mieux.
Souvent discuté, rarement bien exécuté.
C’est le point suivant, ne le ratez surtout pas.
4/ Pédaler comme un pro
Pour franchir les montées comme une gazelle, il vous faut une technique de pédalage au top.
Elle permet de vous économiser, de tenir plus longtemps.
Mais cette technique n’est pas naturelle. On a vite fait d’écraser les pédales, de pédaler ‘en piston’.
Ce sont alors uniquement les quadriceps et les mollets qui travaillent.
Vous allez accélérer l’apparition de la fatigue et votre jauge de puissance va lentement s’affaisser.
L’idéal est de réussir à enrouler, à alléger le poids de la jambe qui remonte.
À solliciter les jambes tout au long du cycle de pédalage. À pédaler rond.
En gardant une cheville bien souple.
Vous activerez ainsi les fessiers (le grand fessier notamment), en plus de solliciter quadriceps, mollets, ischios et jambier antérieur.
Lors des séances faciles, sur le plat vous pouvez vous exercer à pédaler uniquement ‘en tirant’.
Ou, plus équilibriste, et toujours sur le plat, essayez de pédalez sur une jambe en dégrafant l’autre pied et en alternant. Commencez par des cycles de 30 secondes et augmentez progressivement.
Et maintenant, on entre dans le dur…
5/ S’entrainer
Il est facile de lâcher les chevaux sur une bosse si elle fait partie des rares difficultés de votre sortie.
Mais si vous envisagez des sorties bien vallonnées, voire des randonnées en montagne, il va vous falloir contrôler votre dépense énergétique. Et pour cela, appendre votre organisme à s’adapter à 4 zones d’intensité d’effort :
- Zone 1 : intensité légère (Fréquence Cardiaque inférieure à 75% de votre Fréquence Cardiaque maximale)
- Zone 2 : intensité moyenne (FC entre 75 et 85% de votre FC max)
- Zone 3 : intensité soutenue (FC entre 85 et 92% de votre FC max)
- Zone 4 : intensité seuil (FC entre 92 et 96% de votre FC max)
Inutile de mettre de l’acide lactique jusque dans votre bidon.
Rechercher des intensités au-dessus de la zone 4 serait travailler au-delà de votre seuil anaérobie, ce n’est pas utile ici.
Voici quelques exemples de sorties pour travailler ces zones :
- Roulez 2 à 3 heures en zones 1 et 2. Profitez-en pour travailler la technique de pédalage.
- Roulez en zones 1 et 2 jusqu’à ressentir une fatigue importante, mais ne finissez pas épuisé
- Roulez en zones 2 et 3 en repoussant au maximum vos limites de fatigue
- Sur un circuit vallonné, donnez-vous pour objectif de franchir toutes les côtes en zones 3
- Sur un circuit montagneux, franchissez les côtes en zone 3 (voire 4) en maintenant cette intensité durant 15 à 60 minutes selon vos capacités
Plus léger à présent…
6/ En souplesse
On respire, on se relâche, on admire le paysage, on relaxe les épaules.
La dernière des bêtises serait de se figer, les mains crispées sur le cintre.
Une bonne position consiste souvent à avoir les mains au milieu du cintre ou aux cocottes.
Ne mettez pas les mains en bas, position qui entraverait la respiration.
7/ Varier les plaisirs
Se mettre en danseuse permet de faire travailler d’autres muscles et de soulager le dos.
Les jambes supportent alors la quasi-intégralité du poids de corps. Vous pouvez engager davantage de force sur les pédales.
Les pulses vont augmenter un peu : 5 à 8 pulsations supplémentaires ne sont pas rares.
Il est plus confortable de mettre un développement un peu plus grand lorsque vous passez en danseuse. Essayez de diminuer d’une à deux dents. Vous diminuerez la fréquence de pédalage et ne ferez pas trop grimper les pulses.
Balancer le vélo de droite à gauche, trouvez un rythme, le corps restant vertical. Gardez les mains aux cocottes.
Si vous évoluez en peloton, veillez à bien maintenir la pression sur les pédales au moment de passer en danseuse. Sinon vous ralentirez inévitablement, ce qui peut surprendre le cycliste suiveur… et aussi vous faire reculer de quelques places.
8/ La Force
Pour lutter contre la pente, il vous faut développer une puissance minimum.
Votre puissance est le produit de votre force par votre fréquence de pédalage (… et par la longueur de vos manivelles si on veut être rigoureux).
Parlons de la force.
La force du cycliste n’est pas celle de l’haltérophile, qui doit être très fort durant quelques secondes seulement.
Quant à vous, vous devez être capable de soutenir un effort long, à intensité moyenne dans l’ensemble. Voilà qui est radicalement différent.
Pour gagner en force, voici deux pistes simples : les squats et des séances réalisées à basse fréquence de pédalage.
9/ La cadence de pédalage
L’autre composante de votre puissance est la vitesse de rotation de vos jambes.
Il n’y a pas une cadence de pédalage optimale, unique, absolue.
Je préfère retenir ces quelques principes simples :
- Plus vous développez une puissance élevée, et plus vous devrez augmenter votre fréquence de pédalage, pour limiter les tensions sur les tendons et articulations.
- Un pédalage en vélocité vous permettra de détendre les muscles et de préserver votre effort dans la durée. Il n’est pas facile de maintenir cette vélocité après de longues heures de selle.
- À faible puissance, une cadence très élevée sera davantage synonyme d’agitation que d’efficacité. Pourquoi pas en guise d’entrainement à la vélocité, mais pas dans une recherche d’optimisation.
10/ Respirer
La ventilation est votre amie.
C’est un très bon indicateur lors des ascensions. Elle devient progressivement plus ample. Elle ne doit pas s’emballer.
Si vous la sentez devenir hors de contrôle, c’est que vous y allez trop fort. Vous êtes dans une zone d’intensité d’effort trop élevée. Il vous faut redescendre d’un cran.
Lorsque les jambes piquent, se concentrer sur sa respiration permet de penser à autre chose. Vous pourrez veiller à :
- Inspirez longuement avec la bouche, ressentez l’air remplir vos poumons
- Expirez à fond, rapidement, en vidant bien l’air de vos poumons
- Conservez un rythme naturel, ne cherchez pas à respirer trop vite
11/ Aérobie chérie
Conservez un rythme régulier durant l’ascension.
Ne vous mettez pas dans le rouge. Vous le paieriez cash.
Vous arrivez au pied d’un col avec votre niveau, il est ce qu’il est. Pas moyen de tricher.
Laissez s’éloigner celui vous double à toute allure. Il risque de vous embarquer sur un rythme qui n’est pas le vôtre.
Apprenez à ressentir un haut niveau de pulsation sans pour autant être essoufflé.
12/ Tactique
Si vous n’êtes pas particulièrement bon grimpeur, essayez de vous positionner en l’avant de votre groupe à l’entame d’une côte.
Vous pourrez alors vous laisser glisser progressivement vers l’arrière du groupe durant la montée. Si vous réussissez à rester au contact, vous pourrez basculer avec eux au sommet.
13/ Mental
Une bosse est vite passée. Pas un col. Et il se monte souvent seul.
Lorsque les difficultés sont vraiment là, l’épreuve physique se double d’une épreuve mentale.
Intéressant de voir où nos pensées nous emmènent en ces moments.
14/ S’hydrater régulièrement
Le piège dans une montée qui s’éternise : oublier de boire.
Ou boire trop tard.
Toutes les 10 minutes environ est un bon rythme.
Certains vont jusqu’à mettre une petite alarme sur leur compteur.
15/ Être gonflé
Vérifiez que vos pneumatiques sont gonflés à la bonne pression.
Celle-ci dépend de votre poids et de la largeur de votre pneu. Ne surgonflez pas en espérant gagner en efficacité, ce serait contre-productif.
Et surtout, ne gonflez jamais au-dessus de la pression maximale indiquée par le constructeur.
C’est à vous
Vous n’avez plus qu’à sélectionner un parcours avec quelques pentes pour votre prochaine sortie.
Sélectionnez une de ces pistes
…celle qui vous parle le plus
… celle que vous pourrez appliquer avec enthousiasme.
Testez-là.
Améliorez-la.
Faites la vôtre.
Vous ne tarderez pas à en ressentir les bénéfices.
Merci Philippe,
Comme 15 pistes, cela fait beaucoup pour moi, je vais commencer par essayer de perdre les 5 ou 6 kgs que cette année peu mobile avec ces longues journées de télétravail m’a fait prendre !
A bientôt sur les routes!
Clairement ces douze derniers mois ne nous ont pas facilité la tâche …
A bientôt 🙂
Merci pour tes recommandations.
Je fais 95kg et j’habite dans les Pyrénées. En début de saison je fais des sorties en moulinant beaucoup, sans dépasser ce que tu appelles la zone1, ça fait baisser la fréquence cardiaque et donc ça m’aide pour franchir les cols ensuite. Encore merci pour tes articles, bonne route. Henri.
Merci Henri, une bonne piste en effet !
Bonnes sorties à toi 🙂
Bonjour Philippe,
Merci pour ces informations bien utiles.
J essaie d appliquer ces recommandations dans mes sorties avec mon club des hautes Pyrénées.
Dans ma région, au niveau bosses et col, nous sommes relativement bien servis.
Il est vrai que pédaler sur tout le cycle de pédalage est utile, surtout ne pas oublier de tirer sur les pédales.
Au début, on s’aperçoit que certains muscles n ont pas trop l habitude de bosser (ischios notamment).
Bon courage à tous.
Amitiés du 65.
Benoît
Merci Benoit, magnifique 65, j’adore.
Profite bien du soleil revenu, bonnes sorties à toi et à ton club
🙂
Bonjour Philippe, bonjour à tous,
Plusieurs remarques (j’aime beaucoup les montées) :
– concernant le poids, j’avais fait mes propres calculs (régression linéaire) sur mes propres données sur une montée que je faisais régulièrement mais à des poids différents (je peux varier de + ou – 10kg assez facilement). Sur la côte de 9,5Km avec 7% de moyenne (et bcp de passages entre 12 et 16% au début) j’avais un gain de 55 secondes par kg… (pour un poids autour de 75kg) ; donc des résultats bien meilleurs que ce qu’indique Philippe. Par exemple, personnellement en-dessous de 72kg je peux tenir quasiment indéfiniment en danseuse si besoin sur les passages > 12%. Chaque kg en trop c’est une bouteille d’eau qu’on promène avec soi toute la montée !
– Philippe en parle en creux, mais j’insiste sur l’importance du dérailleur et de la cassette. Il ne faut pas hésiter à avoir une cassette d’au moins 28 (personnellement je suis en 32 et j’ai des copains en 34). A 16% en 28 compact je suis à 50 tours minutes max… c’est pas assez rapide ! Et l’erreur du débutant est de chercher à monter en force, il faut accepter de se mettre sur son 28 (ou 32) dès la première difficulté et essayer de conserver sa cadence sur toute la montée (avec de l’expérience il faut s’entraîner à reprendre des dents à chaque replats pour reprendre de la vitesse). Quand on est sur du vallonnée (j’ai vécu un an sur du super vallonnée), il faut vraiment jouer du dérailleur pour essayer de conserver sa cadence sur toute la bosse. Idéalement on entre dans la bosse avec le max d’élan à 90tr/min) et on change de vitesse très vite (parfois toutes les 4 – 5 secondes) pour rester le plus longtemps possible à 90trs et essayer de ne pas sortir de la bosse en dessous de 80tr/min (et à la fin terminer en danseuse si on est sous les 80tr.min).
– Même s’il n’y a pas de cadence absolument bonne pour tous, en débutant on a tendance à ne pas tourner assez, avant de bien se connaître essayer de monter autour de 85 tours/min, après pour certains ce sera un peu plus, d’autres un peu moins, mais c’est un bon repère.
– Une bonne manière de monter sans forcer ni trop s’endormir c’est de monter à la fréquence cardiaque. Dans mon cas si je veux monter cool sur une route que je sais longue, je vais monter entre 140 et 150 : si je passe sous les 140 je relance en danseuse ; si je passe au-dessus des 150 je ralentis et je force moins. Si je cherche un bon temps je vais monter (sur des longues montées) entre 150 et 160 (mais je sais que ça sera sans doute mon seul bon temps de la journée). La FC c’est dans ce cas mieux que la puissance car ça tient compte de notre fatigue.
– Pour les longues montées, pour garder le moral il faut penser petit, le prochain village, la prochaine borne kilométrique, voire dans les passages particulièrement difficiles, juste le prochain virage. Si on se met à penser aux 14km de montée on s’arrête…
Et enfin pour le type qui double à fond au début de la montée… ne jamais perdre espoir de l’avoir rattrapé (en gardant son rythme) avant la fin de la montée… on rencontre beaucoup d’optimistes (ou de prétentieux) en bas des cols (qui ont beaucoup gagné en réalisme une fois en haut ;-))
Bonnes montées à tous !
Damien.
Merci Damien de nous faire profiter de ton retour d’expérience. Excellent 🙂
Bonjour Philippe,
Je ne me lasse pas de te lire. Je ne suis plus un jeune homme depuis longtemps, tu le sais.
Dans le passé, j’ai participé à de nombreuses randos en montagne, je suis passé par les principaux cols, alpins et pyrénéens, sans oublier le Ventoux. Je n’ai jamais été un grimpeur, en Île de France, il y a peu de cols. Si j’avais pu lire à l’époque tes bons conseils, j’aurai gagné beaucoup de temps, et surtout j’aurais été beaucoup moins fatigué. Mais ça reste de très bons souvenirs.
Bravo et merci pour toutes ces informations.
J’attends avec impatience, la suite.
Amitiés
Jacques
Merci Jacques. Un bon prétexte pour retourner visiter tes cols alpins 🙂
Amitiés, Philippe